Sur le dispositif "citoyens référents" un débat approfondi qui ouvre des perspectives.

Le 01/03/2021

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Le 16 Février la coordination "Le Monde d'Après" organisait un premier débat en conférence vidéo sur le projet municipal de "citoyens référents". Quarante sept personnes mobilisées à l'appel de la coordination pour la défense des libertés publiques ont participé à trois groupes de travail pour analyser ce qui fonde ce projet de mobilisation des citoyen.ne.s pour sécuriser la ville !

Vous n'avez pu participer au débat et ce projet vous inquiète et vous mobilise, nous avons enregistré et rédigé la synthèse des trois groupes.

La coordination va suivre attentivement la mise en place de ce projet par la municipalité et poursuivra la sensibilisation et la mobilisation citoyenne pour qu'il y soit mis un terme ou pour en limiter les effets néfastes.

Synthèse des trois groupes de travail

Groupe N° 1

Sur quelles données et quel diagnostic partagé se fonde ce projet ?

=> Qu’est-ce qui peut motiver la mise en place à Saint-Malo d’un dispositif comme les citoyens référents ?

-> il n’y a pas de données récentes objectives permettant d’attester une croissance de la délinquance et des incivilités sur le territoire.

-> Il y a bien sûr quelques évènements qui font partie de la vie normale d’une ville comme Saint-Malo : ainsi à l’été 2019 on a signalé un été chaud avec quelques bandes dans certains quartiers mais ce sont des évènements ponctuels, connus et biens maîtrisés par les force de police.

=> Quelles autres raisons alors pour justifier le besoin d’un dispositifs participatif qui rapprocherait la population de la police avec le Maire au milieu ?

→ le constat (ou la crainte) d’une fracture, d’une perte de confiance qui d’étend, y compris à Saint-Malo, entre la population et la police du fait de l’actualité tendue : une montée des violences policières vis à vis des gilets jaunes et des mouvements sociaux, un décès inexplicable au commissariat de Saint Malo, les contrôles liés à la Corvidé 19.

→ la volonté de la Mairie de communiquer sa volonté de résoudre les problèmes, montrer qu’elle agit en toutes choses. Donc plutôt un objectif de communication politique que de résolution de problèmes.

=> Le groupe fait des constats :

→ Les moyens de police pour faire face aux problèmes de sécurité publiques existent déjà mais on n’envisage pas de les améliorer, ni d’accroitre les effectifs, la formation...

→ Il y a un décalage entre ce dispositif de « citoyens référents » et le problème, ses formes les plus visibles : les bandes de jeunes et les trafics à la gare ou les rodéos motorisés à la découverte…

→ L’identification d’un citoyen par quartier ne va pas régler le problème de la confiance de la population dans la police. Le référent va apparaître ou être un « petit chef local »

→ La mairie, notamment l’ancienne municipalité, a plutôt eu la volonté d’invisibiliser certaines populations sur l’espace public : les pauvres, les SDF… L’attachement du premier adjoint actuel au développement touristique pourrait aller de pair avec cette volonté de ne pas garder dans la ville des gens qui font tâche sur l’image touristique !

En conclusion : Il ne s’agit pas de nier l’insécurité provoquée par des actes de délinquance et des manifestations d’incivilité à Saint-Malo, mais aucune donnée objective n’atteste l’atteinte d’un seuil critique ou un accroissement de ces phénomènes et la solution proposée n’est pas pertinente pour prévenir ces actes et pour rapprocher et renforcer la confiance de la population vis à vis de la police républicaine (police nationale, municipale et gendarmerie).

Synthèse du groupe N°2

Quelles solutions imagine-t-on  ?

 

Avant d’envisager des solutions le groupe a voulu poser un cadre de référence, des principes et critères pour une politique locale de sécurité : bienveillance, intérêt général, service public, participation information et contrôle citoyen.

La proposition de Mr Lurton se fonde sur des actes négatifs comme la délation, la vigilance pour ne pas dire la surveillance de tous par tous. Une vitre est cassée je rapporte au citoyen référent qui rapporte à la police ! C’est pas très intéressant. Une telle orientation dévoie les principes de la participation citoyenne. Pourquoi ? Alors que l’on vit dans une ville relativement tranquille comme Saint-Malo (dans son rapport annuel le PSQ* relève 3328 faits de délinquances pour l’année 2017).

Les membres du groupe proposent :

=> Tout d’abord une police de proximité qui pourrait prendre la forme des îlotiers (Réforme de 1998) qui auraient pour mission de juguler le «sentiment d'insécurité». L’idée est aussi, ainsi de transformer l'image de la police enfavorisant des rapports avec la population. Cela nécessitera une véritable formation.

=> Ensuite développer la participation citoyenne :

→ par la promotion des gestes qui ne nécessitent pas d’organisation complexe ni d’encadrement particulier. Il ne faut surtout pas opposer l’action collective et l’entraide entre individus. Déjà de nombreux voisins s’échangent leurs clés lors des départs en vacances. Il pourrait y avoir des campagnes de promotion de ce type d’attitudes.

→ par la mise en place de véritables conseils de quartiers qui établiront un bilan de la situation et des besoins des habitants en faisant attention à ne pas limiter leur action à la gestion de la sécurité. Les chiffres de la délinquance sont faibles mais il existe indubitablement un sentiment d’insécurité. Attention ces conseils doivent s’occuper en priorité du mieux vivre et faciliter le lien social Le 17 doit rester le pilier de la sécurité géré par des professionnels.

→ Le citoyen ne devrait jamais remplacer la police. A Quimper la ville a mis en place ce type de conseils en remplacement des dispositifs de surveillance électroniques (caméras etc...)

=> Enfin augmenter le nombre d’animateurs de quartiers professionnels formés qui auront pour mission d’animer les conseils de quartiers et aideront les populations à s’organiser. Ces animateurs pourront être recrutés à l’intérieur des « ilots ». Cf l’expérience d’Issy-les-Moulineaux, la ville a préféré embaucher des animateurs plutôt qu’installer des systèmes de surveillances électroniques.

 

=> Un constat : Mr Lurton ne respecte même pas les principes qui étaient ceux qu’il annonçait dans le programme des élections municipales. Il prévoyait un dispositif de « voisins solidaires » avec une commission de concertation préalable.

=> Deux exigences :

→ Sur ces sujets, l’information des citoyens est un enjeu fondamental et les médias locaux peuvent la relayer.

→ Il faut organiser les conditions d’un grand débat qui permette la mise en place d’un dispositif avec des domaines d’intervention clairement identifiés et limités.

→ Il ne faut sous aucun prétexte que cela puisse déboucher sur la privatisation du service public de gardiens de la paix. Rien ne se fera, pensent les membres du groupe, sans une défense sans concession du service public qui est le seul a pouvoir structurer une politique du bien vivre ensemble avec la meilleure garantie possible du respect des principes évoqués en préambule de la réflexion du groupe.

 

* PSQ : La police de sécurité du quotidien (PSQ)1 est une nouvelle doctrine d'emploi de la police française annoncée par le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb

 

Synthèse de l’atelier N°3

Faire le constat et réfléchir au rôle des politiques et services sociaux en matière de prévention de la délinquance et promotion du mieux vivre ensemble.


=> Quelle politique sociale à Saint Malo ?

→ On a plus le sentiment d’un empilement de décisions sectorielles plutôt que d’une politique globale de nature à traiter le problème de façon systémique.

→ On s’étonne d’un changement d’attitude du maire impliqué dans les questions sociales pendant son mandat de député. Les citoyens référents relèvent-ils d’une démarche clientéliste vis à vis de ses soutiens qui se recrutent pour une part au sein des catholiques traditionalistes).

=> Quels moyens sont à disposition des organismes sociaux ? Pour quelles missions ?

→ Le CCAS : moyens constants pendant la mandature Couasneau, Renoult, Lurton.

→ Passage du dossier des « politiques de la ville » de la compétence de la commune à celle de l’agglomération ? Quelle conséquences ? Quelle amélioration ? Quelle proximité avec la population ?


=> Comment agir dans les quartiers ?

Il faut combattre la peur avec de l’humain. La réponse n’est pas que sécuritaire et la solution ne se pose pas uniquement en terme d’accroissement de la surveillance et de la répression

→ Combattre le sentiment d’insécurité, injustifié dans les beaux quartiers de Saint Malo.

→ Remédier à la faiblesse du dispositif d’animateur social de quartier (Quelle équipe de prévention sur La Découverte et à la gare ?). Arrêter la désagrégation du service public par le manque de personnel. Augmenter les moyens donnés aux associations.

→ Faire évoluer les fonctions des Maisons de quartier, au-delà du prêt de salles pour, y installer des professionnels de l’accompagnement et du développement social

 

=> Au delà de Saint-Malo, le groupe a relevé dans plusieurs communes du pays une inflexion des politiques communale vers plus de surveillance (vidéo surveilance notamment.).

→ Cela coincide avec des campagnes de communication des services de l’Etat auprès des maires en appui de la circulaire Déméter.

→ C’est aussi une conséquence de l’évolution des populations dans le sens d’une gentrification des communes littorales ou proches du littoral, là où s’installent les CSP+ qui renchérissent le marché immobilier. Ils craignent pour leur tranquillité et pour leurs biens et ont le soucis de les protéger.

 

=> Enfin les participants constatent un défaut d’informations précises sur la mise en œuvre du dispositif de citoyens référent : où on en est des décisions, quel profil de recrutement ?...

→ Et l’un d’eux pose une question stratégique Si on avait été mieux informés et plus tôt n’aurait-il pas fallu participer à l’appel à candidature pour tester les critères de sélection et pour tenter de l’infléchir le dispositif de l’intérieur ? Poser la question fait réfléchir mais n’entraîne l’adhésion automatique.